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Représentations, pratiques, société et individu sous l’enquête des sciences sociales: Jodelet, Les représentations sociales

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(juin 2007)Textes de méthodologie en sciences sociales choisis et présentés par Bernard Dantier Extrait de: Denise Jodelet, Les représentations sociales, Paris, PUF, 1994 (pp. 36-57).
DOI: http://dx.doi.org/doi:10.1522/25022684

Abstract

Très tôt les sciences sociales ont conçu et mis en usage « la représentation » (cette façon de rendre symboliquement présent à soi et à autrui tout ou partie du monde en dehors du champ de la perception directe). Que cela soit par exemple chez Émile Durkheim avec la notion holiste de représentations collectives ou chez Sigmund Freud avec celle plus psychologique de représentation intrapsychique (« représentance »), on a tenté de prendre en compte dans l’étude des phénomènes humains cette part qui apparemment revient à la subjectivité de l’individu pour la relier à son environnement social. Très tôt aussi on s’est interrogé sur la causalité en jeu : la représentation est-elle le simple effet passif et souvent déformé de ce monde par le biais des pratiques dont elle serait une reproduction simulée (thèse d’Emile Durkheim à la suite déjà de Karl Marx), ou possède-t-elle une certaine autonomie qui par la force des connexions logiques et des réactions affectives lui donne puissance de structurer les pratiques et de modifier le monde (thèse de Max Weber) ou encore, ces thèses étant jugeables réductrices, la représentation et la pratique sont-elles les deux versants indissociables d’une même réalité (thèse de Pierre Bourdieu avec le concept d’habitus)? C’est en reprenant ces problématiques que l’équipe, coordonnée par Denise Jodelet, équipe qu’on appelle « l’école française des représentations sociales », s’attaque aux représentations en tâchant de les relier aux diverses dimensions de la vie humaine et sociale, en leur conférant le rôle fondamental de centre de liaison et de coordination. Dans le texte qui suit le lecteur pourra constater que cette école construit un appareil d’analyse très syncrétique : d’Émile Durkheim à Jean Piaget sans négliger Sigmund Freud, rien n’est mis de côté de l’héritage des sciences sociales pour tenter d’aborder ces représentations dans la multidisciplinarité si ce n’est même la transdisciplinarité. L’influence de la psychologie sociale américaine n’est pas non plus rejetée ici: le souci qui conduit les auteurs à expliquer et comprendre les élaborations de ces représentations au travers des interactions dans les groupes entre individus, rappelle nombre de travaux de recherche où aux USA des spécialistes s’appliquent à ramener les phénomènes globaux du social à des actions et réactions interindividuelles étudiables psychologiquement (type d’approche que Durkheim, dont pourtant se réclament nos auteurs, prohibait radicalement). Aussi ce syncrétisme peut-il paraître nuire finalement à l’unité et à la cohérence de cette forme de recherche et de théorie. Cependant le mérite resterait dans cette tentative de rassembler et de synthétiser ce qui trop souvent se trouve trop facilement séparé et placé en absolu. Il sera toujours bon, en tout cas, dans toute enquête utilisant questionnaires et entretiens pour recueillir des informations issus de l’univers mental des individus, d’avoir à l’esprit les problématiques concernant les représentations et les théories que leur usage met en jeu. Bernard Dantier, sociologue 27 mai 2007.

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